La marche

Elle marche. Le vent plaque sa bure contre son visage, tandis que le sable s’insinue partout. Ses paumes tournées vers le ciel à hauteur de son ventre reposent l’une sur l’autre. C’est cette posture qu’elle utilise pour méditer mais contrairement à beaucoup de Jedis, Jaeda médite en marchant. C’est le mouvement qui l’apaise, c’est l’action qui la réalise. Depuis sa plus petite enfance, la jeune femme n’a jamais su rester statique durant ses contemplations. C’est Kerna qui a trouvé la parade, lui enseignant cette vieille technique.

Elle marche, les yeux mi-clos, le regard légèrement baissé, elle fixe le Vide. Elle ne perçoit plus le monde qui l’entoure, elle le perçoit trop, elle le perçoit autrement.

Elle marche. Un demi-pas pour un souffle, tel est le secret de la technique. Tandis qu’elle pose doucement le haut de son pied, elle inspire. Quand elle pose le talon, elle expire. Inspiration, son ventre se creuse. Expiration, son ventre se gonfle. Elle respire à l’envers, c’est le Pranayama, le souffle de l’Infini, l’Echo de la tranquilité, le secret de l’Equilibre.

Elle marche, posant ses pieds l’ un après l' autre L’avancée est lente, la contemplation du Vide infinie. Elle marche depuis des heures, elle marche depuis des jours, elle marche depuis des mois, elle marche depuis des siècles, elle marche depuis le Commencement, elle marche depuis la Fin.

« Tu ne fais qu’une avec la Force. Tout le reste n’a plus d’importance. Tu ne fais qu’une avec la Force. Renoncement. Renonce, renonce, renonce. Tel est le chemin de l’apaisement. Se détacher, s’apaiser, être sereine, être en paix. »

Jaeda contemple le Vide, elle contemple le Tout universel, elle se détache peu à peu de tout ce qu’elle est, devenant pure énergie, pur mouvement, pur esprit. Son corps n’existe plus, la voici qui s’élève à un autre stade de conscience. Les émotions disparaissent, le monde disparaît et tout ce qui la rattachait au monde matériel disparaît.

Elle se rappelle les roches rouges et cette longue marche. Elle l’a déjà faite. Un pas après l’autre. Un pas pour se détacher, un autre pour oublier. Elle a déjà contemplé le Vide. Elle était ici pour les mêmes raisons. Pour se détacher. Un autre regard, un autre visage, le souvenir d’une étreinte. La chaleur d’un être. Sa voix basse lui chuchotant des mots. "Nous ne faisons plus qu'un, mon aimée. Et je te jure que même la Force ne pourra nous séparer. Je viendrais te chercher où que tu sois, quoi que tu sois devenue. Rien ne m'arrêtera. Rien, ni personne."

Jaeda trébuche.

Sur Manaan, dans une cellule de contention, un maître jedi complètement dément se met à hurler.